Tous les trains de ce monde ont une âme joyeuse. Et s’il y en a un qui égaye les Pyrénées Orientales, c’est bien le Train Jaune de Cerdagne. Arborant fièrement les couleurs Sang et Or du pays Catalan, le canari, comme le surnomment les habitants du coin, est sans l’ombre d’un doute le plus charmant des trains de montagne. Suspendu entre ciel et terre, il se joue du vide et défile avec allure dans la région. A son rythme, il gravit les côtes escarpées de la vallée de la Têt et traverse des paysages uniques. Installez-vous près de la fenêtre, profitez du spectacle et laissez-vous bercer par le rythme réconfortant de ses wagons qui dandinent. Attention à la fermeture des portes, le train va partir…
La ligne ferroviaire du train jaune de Cerdagne
Un peu d’histoire…
Avant d’être une attraction touristique, il faut savoir que la ligne ferroviaire du Train Jaune est avant tout un service d’utilité publique. Elle a pour mission de relier les hauts plateaux catalans au reste du département et ainsi de désenclaver le territoire.
Les premiers travaux entrepris au début du siècle permirent dès 1910 de relier Villefranche-de-Conflent à Mont-Louis, deux places fortes Vauban. La ligne définitive ne sera achevée qu’en 1927 en atteignant Latour-de-Carol, son terminus actuel.



Bien que cela puisse surprendre, c’est aujourd’hui une ligne TER qui dessert une vingtaine d’arrêts et qui est empruntée, été comme hiver, par les usagers de la région.
Un projet ambitieux
Pour se jouer du relief et franchir de nombreux obstacles naturels, les bâtisseurs de l’époque se sont lancé un projet aussi technique qu’ambitieux. La construction de la voie a nécessité l’édification de pas moins de 650 ouvrages. Parmi eux, on dénombre 19 tunnels dont ceux du Planes (337m) et du Pla de Llaura (380m) ainsi que 2 ponts remarquables inscrits aux Monuments Historiques : le Viaduc Séjourné et le Pont Gisclard.
Aujourd’hui encore, cette ligne bat des records. Longue de 63 km et comptant près de 400 courbes, elle dessert la plus haute gare SNCF de France, la gare de Bolquère / Eyne. Le Train Jaune passe ainsi d’une altitude de 427 m à 1 592 m et affronte par endroit une déclivité d’environ 6%. C’est un véritable exploit pour un petit train sans crémaillère.


La ligne a été inscrite en 2002 sur la liste du Patrimoine mondial de l’UNESCO et a ainsi fêté dignement ses 100 ans. Véritable symbole des Pyrénées Catalanes, elle fait la fierté de ses habitants.
Notre itinéraire via le train jaune de Cerdagne
Le Train Jaune à Villefranche-de-Conflent
Notre périple débute en gare de Villefranche-de-Conflent. Ce matin la cité dort encore et nous sommes les premiers arrivés au guichet. Objectif du jour, rejoindre la place forte de Mont-Louis par la mythique ligne du Train Jaune.
Après quelques minutes à braver le froid, nous percevons au loin le bruit lancinant de ses essieux. Ce fier petit bout de ferraille arrive joyeusement en gare et égaye de ses couleurs éclatantes cette froide matinée d’hiver. Il nous rejoint puis freine soudainement dans un crissement strident qui déchire le silence de la vallée.


Nous en profitons pour l’observer en détail. Au delà de son jaune éclatant, ce qui frappe au premier coup d’œil c’est l’absence de caténaire. Le train fonctionne par traction électrique mais il est alimenté par un rail latéral à la voie de roulement. Si ce système ingénieux est communément utilisé par le métro, à l’époque il représentait la pointe de l’innovation.

En interrogeant le contrôleur, nous apprenons également que la plupart des motrices qui tractent les wagons datent de l’ouverture de la ligne. A l’ère de l’obsolescence programmée, cela semble être un petit miracle.

La rame comprend un chariot à ciel ouvert. Spécialement conçu pour profiter au mieux du panorama, il permet une immersion totale dans la nature et les paysages environnants. Si vous visitez la région par temps clément, n’hésitez pas une seconde à jouer des coudes pour vous y installer. En plein cœur de l’hiver, nous nous sommes réfugiés au chaud à l’intérieur des cabines. Cela sera donc pour une prochaine fois.

Le voyage
En voiture, le film va commencer
Nous partons enfin. Le train quitte la cité médiévale et prend la direction d’Olette. La voie s’élève et dévoile peu à peu les trésors cachés du Haut-Conflent. Qu’il est agréable de se faire bercer par le paysage qui défile. Au détour d’une courbe, on aperçoit ici un village, là une chapelle. Entre les pics rocheux, le train se faufile à travers de petites vallées encaissées à la végétation dense. En contrebas, on devine l’entrée secrète des gorges perdues des Pyrénées Orientales tandis qu’au loin se détachent des sommets saupoudrés de neige. En toile de fond, le grondement inlassable des roues sur les rails incite à la rêverie et l’esprit s’envole avec légèreté.



Des ouvrages remarquables
Passé Thuès-Carança, le train traverse la rivière Têt en empruntant le pont Séjourné (ou pont de Fontpédrouse). Inscrit aux Monuments Historiques en 1942, cet ouvrage de 236 m de long est remarquable. Il s’agit d’un pont à deux étages séparés par un tablier intermédiaire. Visibles depuis la nationale, des créneaux ornent sa partie centrale tandis qu’un arc ogival constitue l’étage inférieur. Habitués à l’apercevoir à travers le pare brise de notre voiture, c’est très surprenant de changer de point de vue et pour une fois de dominer la route en contrebas.


Quelques minutes plus tard, nous marquons l’arrêt à Fontpédrouse / St Thomas-les-Bains et nous apprêtons à découvrir un autre chef d’œuvre architectural, le pont Gisclard. Premier pont ferroviaire métallique réalisé en France, cet ouvrage porte le nom de son concepteur qui décéda en 1909 lors d’un accident ferroviaire. Survenu au cours d’un essai de charge, cet évènement tragique n’a pas été vain. Il a permis de renforcer l’édifice qui à ce jour est l’unique pont suspendu ferroviaire encore en service dans le pays.

Pour admirer ces élégantes structures, n’hésitez pas à affronter votre peur du vide et sortir la tête par la fenêtre. Cheveux au vent, perchés à près de 80 m au dessus des flots, les sensations sont garanties!
La citadelle Vauban
Nous atteignons enfin notre destination finale, Mont-Louis. Alors que le train poursuit son chemin, nous partons découvrir la cité du Soleil-Roi. Sur son promontoire, la citadelle Vauban est l’élément de défense de cette place forte. Inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2008, elle constituait au XVIIème siècle le dernier rempart avec l’Espagne.



Derrière les murs austères de la forteresse, nous arpentons ses ruelles et découvrons l’église Saint-Louis. Plus haut, le fort a su garder sa vocation militaire et accueille aujourd’hui le Centre National d’Entraînement Commando-1er Choc. Les rues sont désertes et le froid nous assaille. Il est temps pour nous d’aller se réchauffer au coin du feu et goûter un plat typique du Roussillon, les « Boles de Picolat ».




Le four solaire
Après cette pause culinaire bien méritée, nous apprenons que le four solaire qui se dresse à l’entrée de la cité est la première installation de ce type dans le monde. Créée pour faire fondre du minerai, son immense parabole concentre jusqu’à 10 000 fois les rayons du soleil et peut atteindre plus de 3 000 °C.

Ayant servi de modèle au monde entier, le four cède aujourd’hui sa place à celui d’Odeillo. Ce dernier permet la cuisson de céramiques d’art, la fusion de métaux et même la fabrication d’objets comme le sifflet de notre célèbre Train Jaune. Nous n’aurions jamais imaginé qu’un tel procédé pouvait être utilisé de manière industrielle.

Le soleil décline et il est temps pour nous de prendre le chemin du retour. Adossés contre la fenêtre, nous nous prenons à rêvasser une fois de plus devant le paysage qui défile au rythme du train. Un moment d’introspection nostalgique et réconfortant qui aligne le cœur et l’esprit.
Quand emprunter le train jaune de Cerdagne?
Quelles que soient les conditions climatiques, la ligne assure toute l’année plusieurs rotations quotidiennes. Chaque saison offre des paysages superbes et totalement différents.
Comme toujours, la saison estivale sera la plus prisée et il faudra jouer des coudes pour s’installer à bord du wagon découvert.
En ce qui nous concerne, nous préférons l’automne et l’hiver pour leur ambiance si particulière et la baisse de fréquentation.

Le trajet de bout en bout dure près de trois heures et rejoindre Mont-Louis à partir Villefranche-de-Conflent, nous a pris environ 1h40.
Où réserver son billet pour le train jaune de Cerdagne?
Les billets du Train Jaune de Cerdagne doivent être réservés à l’avance ne peuvent s’acheter qu’au guichet des gares desservies de manière permanente : Villefranche-de-Conflent, Fontpédrouse, Mont-Louis, Font-Romeu, Bourg-Madame et Latour-de-Carol.


En période estivale à Villefranche-de-Conflent, nous vous conseillons fortement de réserver votre billet la veille ou tôt le matin. Par ailleurs arrivez une bonne demi-heure avant le départ pour éviter que le train ne soit plein.
Le prix du billet est établi en fonction de la gare de départ et de la gare d’arrivée. Au départ de Villefranche-de-Conflent , comptez environ 20 EUR par personne pour rejoindre Mont-Louis et plus du double pour atteindre le terminus à Latour-de-Carol.
A quelles stations s’arrêter?
Les stations principales
Autant vous prévenir, cela a été compliqué pour nous de savoir exactement quoi faire et où s’arrêter avant de prendre le train. Nous avons donc créé l’infographie ci-dessous pour vous aider à y voir plus clair. Elle regroupe les informations que nous avons pu collecter sur place. Nous espérons donc qu’elle vous sera utile.

Les lieux d’intérêts par station
En complément, vous trouverez ci-dessous la liste des lieux d’intérêts par station et quelques infos pratiques :
- Villefranche-de-Conflent/ Vernet-Les-Bains :
- Villefranche-de-Conflent (Cité Vauban / Unesco)
- Fort Liberia
- Grottes de Canalettes
- Thuès-les-Bains : Randonnée des bassins sauvages d’eau chaude de Thuès les bains. Plus d’infos par ici.
- Thuès / Carança : Randonnée des Gorges de la Carança. Allez LA pour découvrir notre article dédié à cette superbe randonnée.
- Fontpédrouse / St-Thomas-Les-Bains
- Bains d’eaux chaudes sulfureuses de St-Thomas à environ 40mn. Plus d’infos par ici.
- Points de vue sur le pont Gisclard
- Points de vue sur le pont Séjourné
- Mont-Louis / La Cabanasse
- Mont-Louis, cité Vauban, déclarée au patrimoine de l’Unesco. A environ 15mn, plus d’infos par là.
- Four Solaire de Mont-Louis. Plus d’infos par ici.
- Bolquère/ Eyne :
- Plus haute gare SNCF de France. Village à 5mn.
- Station de ski Pyrénées 2000 à 4km/45mn. Plus d’infos par là.
- Font-Romeu / Odeillo / Via : Station de ski de Font-Romeu à environ 20mn. Plus d’infos par ici.
- Saillagouse : Sources d’eaux chaudes sulfureuses des bains de Llo à 2km / 25mn. Plus d’infos par là
- Latour-de-Carol / Enveitg :
- Village d’Enveitg à 15mn
- Vol en montgolfière à l’aérodrome de la Cerdanya à environ 15km. Plus d’infos par ici.
Il est bien sur possible de faire des randonnées à presque tous les arrêts et nous ne les avons donc pas toutes listées à l’exception des eaux chaudes de Thuès-Les-Bains et des Gorges de la Carança.

N’oubliez pas que tous les arrêts ne sont pas obligatoires et qu’il faudra avertir le contrôleur de votre itinéraire pour que le train marque l’arrêt. Par ailleurs, de nombreux établissements situés le long de la ligne proposent des réductions sur présentation de votre billet de train. N’hésitez donc pas à leur demander s’ils participent à l’opération.
Comment rejoindre le train jaune de Cerdagne
En voiture
Se rendre en voiture jusqu’à la gare est relativement simple et rapide où que vous soyez dans les Pyrénées-Orientales. Nous vous conseillons de stationner votre véhicule à la gare de Villefranche-de-Conflent ou à Latour-de-Carol pour choisir votre place dans le train.

En transports en commun
La ligne du Train Jaune est exploitée par la SNCF et fait partie intégrante du réseau TER Occitanie. On peut donc la rejoindre à ces deux extrémités par une correspondance « classique » :
- A Villefranche-de-Conflent : correspondance avec le TER en direction de Perpignan.
- A Latour-de-Carol, correspondance avec
- le réseau français via la ligne TER qui amène à Toulouse,
- le réseau espagnol vers Barcelone.

Où dormir dans le coin?
Pour être au plus proche du Train Jaune, séjournez à Villefranche-de-Conflent dans l’ancienne poste ou cet hébergement. Cela sera l’occasion de découvrir cette cité fortifiée inscrite au Patrimoine Mondial UNESCO et de monter au fort Liberia.
Pour rester quelques jours dans une ambiance Nature, nous vous conseillons de séjourner à Eus dans cet établissement qui a une vue imprenable sur les montagnes. On adore.
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Le train a ce pouvoir unique de modifier l’espace et le temps. A son bord, l’esprit s’envole avec légèreté et le temps semble suspendu. Un moment de rêverie à vivre au cœur des Pyrénées Orientales…